Le procès des agresseurs d'homos s'ouvre ce mardi

Les quatre agresseurs de Bruno Wiel comparaissent à partir de ce mardi devant les Assises du Val-de-Marne, à Créteil.


Les faits remontent au mois de juillet 2006. Après avoir passé la nuit dans des boîtes gays de la capitale, Bruno Wiel, un comptable de 28 ans, est enlevé par quatre hommes rencontrés aux abords de la place du Châtelet. Torturé, brûlé avec des cigarettes et violé avec un bâton, le jeune homme est laissé pour mort dans le parc des lilas, à Vitry-sur-seine. Le 21 juillet au matin, des promeneurs le découvrent totalement nu, inconscient, le corps couvert d'ecchymoses. Bruno Wiel ne garde aucun souvenir de cette agression, son crâne ayant été "pris pour un ballon de foot" selon les déclarations de ses agresseurs.

A l'époque, Julien Sanchez, Antoine Soleiman, Yohan Wijesinghe et David N'Gagoue avaient de 20 à 25 ans. Ils sont aujourd'hui jugés pour enlèvement et séquestration, doublés d'actes de torture et de barbarie. Circonstance aggravante pour eux, Bruno Wiel aurait été choisi pour son orientation sexuelle. Deux autres victimes devraient également témoigner mais leur venue à l'audience demeure incertaine.

Tout, dans le mode opératoire de ce gang, laisse penser qu'ils prenaient pour cible des homosexuels

Ce procès, programmé sur deux semaines, sera-t-il celui de la délinquance "ordinaire" ou celui d'un nouveau "gang des barbares", accusé de "cibler" ses proies? Ce sera à la cour de trancher. Mais pour l'avocat de Bruno Wiel, Me Cyril Dubois, il n'y a aucun doute: "Tout, dans le mode opératoire de ce gang, laisse penser qu'ils prenaient pour cible des homosexuels." Les trois victimes, accostées dans ou au sortir de bars gays, auraient été sélectionnées pour leurs orientations sexuelles présumées. La bande entrait en contact avec eux afin de leur dérober cartes bancaires et autres objets de valeurs. "Il y a un vrai fantasme du riche homosexuel qui expliquerait le déchaînement de violence contre Brunp", explique Me Cyril Dubois. "Bizarrement, les quatre hommes fréquentaient des établissements gays", poursuit l'avocat pour qui "les agresseurs ont procédé comme le gang de Youssouf Fofana [le chef du gang des barbares, NDLR]".

Les avocats des accusés n'étaient pas tous joignables le lundi 17 janvier, à l'exception de Me Céline Bouchereau, qui défend David N'Gagoue: "Mon client ne peut toujours pas expliquer son geste, explique-t-elle à LEXPRESS.fr, mais il est très conscient de la gravité de ce qu'il a fait." Me Patricia Kohn, qui défend Julien Sanchez depuis quelques semaines, confie que son client essaie lui aussi de trouver des explications: "Il sait que ce qu'il a fait est inadmissible. Il le reconnaît et l'assume. Son temps de détention a aussi été un temps de réflexion et il est très angoissant pour lui de se retrouver face à Bruno Wiel."
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Lire le témoignage de Bruno Wiel

A la demande de ce dernier, l'association SOS homophobie s'est constituée partie civile. L'association n'est "pas là pour représenter [Bruno], mais bien pour soutenir sa démarche", selon son président Bartholomé Girard. L'occasion, pour lui, de rappeler que "l'agression de Bruno Wiel n'est pas isolée". Au cours de la seule année 2009, SOS homophobie a recensé 88 agressions physiques à caractère homophobe. "L'homophobie est d'actualité, martèle Bartholomé Girard, mais trop souvent les victimes ont peur de se faire connaître." En cela, le procès de Créteil, est "emblématique" car "c'est une des rares fois où la victime va au bout de sa plainte et qu'elle a les moyens d'obtenir des réparations, même si celles-ci ne seront jamais à la hauteur de ce que Bruno a enduré".

Aujourd'hui, la vie de Bruno Wiel a changé du tout au tout: déménagement en province, carrière brisée... Il a dû retourner pour un temps vivre avec sa famille. C'est seulement depuis quelques mois qu'"il retrouve une autonomie en vivant seul pour la première fois", confie Me Dubois. "Bruno appréhende beaucoup le procès, mais il a aussi hâte qu'il se tienne pour pouvoir tourner la page."

Ce sera la première fois que le jeune homme fera face à ses agresseurs depuis l'été 2006, cette nuit où il a perdu la mémoire. "Nous ne savons pas bien comment le cerveau humain fonctionne, poursuit Me Dubois. Le fait de voir ses agresseurs bouger, parler, pourrait tout faire remonter à la surface. C'est d'ailleurs une de ses grandes frayeurs."